Forts de notre préparation des 9 derniers mois, c’est enthousiastes et confiants que nous quittons la Belgique le samedi 22 septembre 2018 aux petites heures pour relever le défi des 7 Majeurs. 

Afin de s’acclimater à l’altitude et permettre à Céline de parfaire ses aptitudes à la descente de cols, nous faisons étape quelques jours à Vaujany dans les environs de Bourg d’Oisan. Après l’ascension de l’Alpe d’Huez, du col de Sarenne, du col du Sabot et de la Croix de Fer, notre enthousiasme et notre confiance initiale font place au doute et à la raison… Le défi des 7 majeurs qui nous attend les jeudi 27 et vendredi 28 septembre sera du costaud.

Après une bonne nuit de sommeil à Auron, un petit déjeuner copieux et un dernier briefing avec notre accompagnateur Gauthier, nous prenons le chemin du départ que nous avons fixé à Isola village. A 8h33 précisément, petite photo et nous prenons le départ sous le soleil mais la température est encore fraiche, pas plus de 7 degrés. Les premiers kilomètres défilent rapidement et nous sommes tout sourire lorsque nous atteignons sans encombre le pied de la première difficulté du jour : le col de la Bonette.  L’ascension est agréable, beau soleil, pas de vent et circulation très calme. Nous passons les 2000 m, tout va pour le mieux, les jambes sont bonnes. Les marmottes nous observent d’un air moqueur, nous semble-t-il, elles doivent sûrement se demander pourquoi on roule si lentement; lors du Tour de France, les coureurs passent au moins deux fois plus vite… Nous restons dignes, concentrés et atteignons le sommet pour la première photo souvenir.

Pas plus de 5 minutes et nous repartons direction Vars.Le soleil est presque au zénith quand nous entamons le deuxième col de la journée, la fraicheur a fait place à une chaleur intense, le thermomètre indique 26 degrés et pas un soupçon de vent. Nous buvons beaucoup et Gauthier, notre ravitailleur, ne chôme pas. Malgré cela nous prenons un « coup de chaud » et les cinq derniers kilomètres de l’ascension nous paraissent interminables. Un aigle nous survole, il a dû percevoir notre perte de vitalité et, opportuniste, il doit se dire que, sur un malentendu, il tient peut-être là un bon repas… Pas de chance pour lui, le sommet est atteint et la descente vers Briançon est lancée tambour battant.

La transition vers le prochain col est très longue et le trafic très dense, pas agréable du tout. Seul point positif : le vent est fort et de dos. Nous nous faufilons à travers les embouteillages dans le centre de Briançon en travaux et nous lançons à l’assaut des pentes de l’Izoard. Montée agréable, la température est redevenue correcte, nous profitons de la nature et de la magnifique forêt d’épineux que nous traversons.  Rencontre du troisième type à quelques encablures du sommet : nous croisons un groupe de cinq jeunes qui descendent, tels des trompe-la-mort, en skate-board avec un casque pour seule protection ! Et nous qui pensions être des cascadeurs en dévalant les cols à vélo… Troisième sommet vaincu ce jour, petite photo souvenir, le soleil se couche, la température est redescendue rapidement, nous nous équipons chaudement, installons les lampes sur les vélos et prenons la direction de Château-Ville-Vieille ou nous ferons étape pour la nuit.  Super soirée et diner de roi à la Baïata du Loup (La Chalp), un gîte à recommander; tout y était parfait.

Après une nuit réparatrice, nous voilà repartis pour les dernières 24h avant d’atteindre notre objectif. Il fait très froid, notre suiveur a dû gratter le pare-brise.  Les premiers tours de pédales sont lourds et douloureux et le col d’Agnel arrive un peu vite, nous ne sommes pas encore vraiment chauds.  Mais finalement ça grimpe bien et le sommet est atteint plus rapidement qu’escompté. Nous suivons à présent notre petit rituel, un grand sourire, un petit bisou, une photo, un habillage et hop c’est reparti !

La suite va être moins drôle. En bas du col, nous prenons à gauche et non à droite, emportés par notre élan et notre envie de bien faire nous dévalons dans la mauvaise direction, 28 km avant de nous en rendre compte… Nous stoppons les GPS, mettons les vélos sur la voiture et revenons sur nos pas à l’intersection ratée pour reprendre la route. Pas mal de forces laissées dans l’aventure, nous entamons les premiers lacets de Sampeyre en silence, le regard bas, la journée va être longue, très longue. Col pas facile, il fait à nouveau très chaud et l’état de la route ne rend pas très bien la force mise dans chaque coup de pédale, le moral n’est pas au beau fixe. Comme souvent, la forme peut revenir avec un petit ravito que nous prenons un peu avant le sommet, nous profitons de la vue magnifique et faisons les comptes.

Il faut bien se rendre à l’évidence : la fin de Fauniera et la descente vers Demonte se feront dans le noir. Fauniera, parlons-en… Nous sommes assez perturbés, aucune trace de ce col sur les panneaux, nous nous arrêtons à quatre reprises et à chaque croisement afin de comparer les tracés GPS, plein de choses indiquées partout mais pas de Fauniera… Plus de choix à présent, il ne reste qu’une route, nous devons donc probablement être sur la bonne. Dur, dur, le revêtement est encore plus mauvais que dans Sampeyre et quelques murs très raides complètent le tableau.

La nuit est tombée, il fait froid et le doute s’installe. Nous arrivons au sommet, du moins on le pense, toujours aucune trace de Fauniera. Nous faisons la photo devant une stèle à la mémoire du célèbre coureur italien Marco Pantani, nous nous harnachons pour la descente et prenons à droite direction Demonte. La voiture nous précède et, à mon grand étonnement, je ne la vois pas plonger mais bien monter encore… C’est donc bien cela, nous ne sommes pas encore au bout de nos peines avec ce satané col de la Fauniera. Mais soudain miracle : pour la première fois, le nom du col apparaît. Cette fois on y est !  Nous sommes épuisés et redoutons la descente dans le noir.

Quelques frayeurs plus loin (dont un chat qui y a probablement laissé sa queue), nous arrivons à Demonte ou nous passerons la nuit. Pizzas, pasta et fiesta… Enfin fiesta pas pour nous. Pas de chance : l’hôtel accueille un mariage. La nuit sera courte : trois heures de sommeil et pas une minute de plus.  Nous aurons en tout cas parfait notre connaissance du répertoire italien de chansons populaires…

Départ pour la dernière ligne droite à 4h30.  Il fait encore nuit évidemment mais la température est correcte en comparaison des deux jours précédents. Le pied du dernier col de notre challenge est atteint sans encombre via un tronçon en léger faux-plat bien roulant.  Commence alors la course contre la montre avec pour objectif, rappelons-le, d’être de retour à Isola en moins de 48h, soit avant 8h33. Le revêtement de la route est bien meilleur que les deux premiers cols italiens. Il fait un silence de mort, juste le sifflement du vent qui se renforce de lacet en lacet. Nous quittons la forêt et attaquons la deuxième moitié du col de Lombarde avec un vent de face assez puissant quand le jour se lève. A ce moment, la température diminue brusquement, l’altitude n’arrangeant rien évidemment. Contrairement aux cols français, pas de panneau indiquant les km et les pourcentages de pente, c’est l’aventure et, honnêtement, le stress de voir la route s’élever brusquement. Nos lampes clignotent et cela nous rassure, nous devrions éviter les balles des chasseurs levés tôt pour assouvir, comme nous, leur passion. On s’encourage mutuellement, on est dans les temps mais il ne faut pas de défaillance ou de pépin technique. Gauthier nous dépasse et nous attend au sommet. Nous l’apercevons à présent, un sentiment merveilleux nous inonde et nous pédalons comme jamais, plus de mal aux jambes ou de souffle court, nous volons littéralement sur la dernière difficulté de notre parcours. Ca y est, c’est fait nous y  sommes ! Nous fondons en larmes et nous prenons dans les bras, un bonheur inexplicable.

Quelques minutes pour reprendre nos esprits et nous plongeons vers Isola à la vitesse de l’éclair. A notre arrivée, les cloches de l’église du village se mettent à sonner pour nous accueillir, pur hasard mais il fait bien les choses, il est huit heures pile et nous venons de boucler la boucle en 47h et 27 minutes.

Voilà notre récit de cette merveilleuse aventure, humaine et de connaissance de soi. Quelle expérience magnifique, nous avons bien conscience que la météo nous a été très favorable et que toutes et tous n’ont pas eu ou n’auront pas notre chance.  Avant de terminer, nous souhaitons remercier du fond du cœur notre ami Gauthier Vanhove sans qui tout cela n’aurait pas été possible. Merci pour les ravitaillements, pour ton esprit positif, pour les encouragements et pour ta bonne humeur permanente.

Franck & Céline

2 Replies to “Les 7 Majeurs en duo”

  • Salut Céline, Franck,
    Superbe exploit et récit, merci pour ce magnifique partage.
    Voici qui donne envie encore toutes mes félicitations à bientôt.
    Vincent MICHIELS

  • Je voudrais vous adresser toutes mes félicitations tout d’abord pour l’exploit sportif, votre ténacité et votre courage mais également pour le fait d’avoir porté haut le couleurs du Cyclo Club Lillois.
    Bravo à vous 2,

    le général

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