Ghislain Maréchal est un homme de défis. Auteur de nombreuses performances dans le domaine de l’ultra-triathlon, il sera en juillet prochain au départ d’un challenge hors norme qui consiste à enchaîner toutes les étapes du Tour de France non-stop. Dans le cadre de la préparation de son “Détour France“, il avait fait du défi raid des 7 Majeurs un passage obligé.
Lorsqu’il s’élance ce mercredi 1er juin 2016 à 5 heures du matin, le ciel du Queyras ne laisse rien présager de bon pour la suite de la journée. Depuis plusieurs semaines, pour ne pas dire plusieurs mois, la météo peine à montrer un visage en adéquation avec le calendrier. Les sommets alentours demeurent enroulés dans une épaisse écharpe de nuages alors qu’une bruine persistante plonge le paysage dans une ambiance digne d’un mois d’octobre…
Pour des questions de planning, Ghislain Maréchal n’a cependant pas de marge de manœuvre. Venu de Belgique pour parfaire sa condition dans la perspective du Détour France, il prend la décision de maintenir sa tentative d’aller défier les 7 Majeurs malgré ces conditions difficiles. Bénéficiant du soutien logistique d’un véhicule d’assistance, la prise de risque reste néanmoins mesurée. Pour autant, le programme qui l’attend demeure toujours aussi coriace avec le franchissement de 7 cols à plus de 2000 m d’altitude.
Le col d’Izoard par la Casse Desserte fait office de mise en bouche. Ghislain atteint le sommet toujours accompagné par une bruine glaciale à la limite de la neige avec une température avoisinant 0°. Inutile de s’attarder au sommet trop longtemps. En basculant en direction de Briançon, les conditions ne s’arrangent pas et la descente de l’Izoard demande à être négociée avec une vigilance de tous les instants.
Après la longue période de transition entre Briançon et Guillestre, les premières rampes du col de Vars se profilent. A partir de là, les cols vont s’enchaîner les uns aux autres sans aucun temps mort. Au sommet du col de Vars les conditions demeurent similaires à celles rencontrées à l’Izoard. Le thermomètre affichant tout juste quelques petits degrés supplémentaires au moment de basculer dans l’Ubaye pour rejoindre le pied de la Bonette. Ghislain maintient un rythme régulier. Dans ces conditions, la présence d’un véhicule d’assistance est un gage de “confort” appréciable qui n’enlève cependant rien au défi face auquel il s’est attaqué depuis le petit matin.
Au cours de l’ascension de la Bonette, quelques timides trouées laissent espérer une amélioration de la météo mais sans réelle garantie qu’une fois le sommet atteint la descente sur la vallée de la Tinée ne s’effectue à nouveau sous la pluie. Tel un métronome, Ghislain poursuit sa route et en atteignant la “Cima Coppi” du défi raid des 7 Majeurs, il est en passe d’avoir effectué la moitié du parcours. 3 cols ont été franchis. 4 autres l’attendent encore et non des moindres : Lombarde, Fauniera, Sampeyre et Agnel. La route est encore longue et la fatigue commence à se faire ressentir…
Au sommet de la Lombarde, théâtre de la conquête du maillot rose du Giro par Vincenzo Nibali la semaine précédente, Ghislain Maréchal bascule en Italie. Les 3 cols prochains cols qui l’attendent s’annoncent comme étant les plus redoutables du parcours. A cela s’ajoute la fatigue accumulée après plus de 200 km au cours desquels le thermomètre n’a jamais franchi la barre des 10°.
Il est près de 19 heures lorsque Ghislain s’attaque au col de la Fauniera culminant à 2 481 mètres d’altitude où est érigé un monument à la gloire de Marco Pantani. L’approche est redoutable avec des passages à 15% et l’ascension semble interminable mais Ghislain se montre toujours aussi combatif. Mais alors que le sommet lui tend les bras, un névé barre la route. Il reste à peine 250 m à parcourir pour atteindre le sommet mais il faut mettre pied à terre pour franchir cet obstacle. En revanche, point de salut pour le véhicule d’assistance.
A 250m du sommet du 5 eme col, Ghislain nous fait signe de le dépasser pour prendre les photos au col. Glups, la route est bloquée par la neige. La pluie, le froid, la fatigue sont des problèmes qu’il gère… les congères il ne gère pas. Il nous faire demi-tour, sauf que la route est aussi large que notre Renault Trafic.
A cet instant, Ghislain Maréchal est face à un choix difficile : soit il poursuit seul et se lance à la nuit tombante en direction du col de Sampeyre puis du col Agnel en totale autonomie. Soit il met un terme à son périple et rejoins son véhicule d’assistance bloqué par ce foutu névé…
Un choix cornélien entre passion et raison que la raison finit par emporter. Une décision sage compte tenu des conditions difficiles, de la nuit tombante et de la fatigue accumulée.
Ghislain se résout donc à mettre définitivement pied à terre et à renoncer à atteindre son objectif de devenir le premier à inscrire son nom sur les tablettes de la Confrérie des 7 Majeurs au rang de “Grand Maître”. Un objectif à sa portée au vue de sa progression malgré les conditions qui ne l’ont pas épargnées. Les esprits chagrins pourront toujours dire que si il avait fait le choix de l’autonomie il aurait pu continuer mais il faut aussi savoir faire preuve de sagesse lorsque cela s’impose. La décision prise par Ghislain est tout à son honneur et souhaitons lui de revenir effectuer une nouvelle tentative par une de ces si belles journées qui font la renommée des Alpes du sud, du Queyras à l’Ubaye en passant par le Piémont et Guillestrois.
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